1er juin 2019

Le ministère des Finances du Québec (le « Ministère ») a publié, le 17 mai 2019, un bulletin d’information (2019-5) dans lequel il annonce, entre autres, une obligation de divulgation des contrats de prête-nom (i.e. des contrats de mandats secrets), peu importe que ceux-ci soient utilisés ou non afin de contourner les lois fiscales.

En droit civil québécois, les ententes de prête-nom sont des contrats de mandat permettant à un mandataire d’agir face aux tiers en son propre nom. En soi, une entente de prête-nom n’est pas illégale lorsqu’elle n’a pas pour but de violer la loi ou des règles d’ordre public.

Avant l’introduction de la mesure de divulgation résumée dans ce bulletin, la divulgation des ententes de prête-nom était nécessaire si l’on souhaitait qu’elles soient reconnues aux fins fiscales. Cette divulgation se faisait par le biais des rapports d’impôts annuels.

Les nouvelles mesures de divulgation sont plus larges et peuvent viser la divulgation d’un contrat de prête-nom servant à des fins commerciales légitimes où la flexibilité et l’anonymat sont recherchés.

Mentionnons, à titre d’exemples :

  1. le contrat de prête-nom servant à dissimuler le véritable acquéreur de terrains, dans une région, afin d’éviter une flambée des prix de vente;
  2. le contrat de prête-nom fait entre plusieurs copropriétaires indivis d’un immeuble qui, face aux tiers, tels les locataires, désirent, pour simplifier la gestion, que les chèques faits aux copropriétaires soient faits à l’ordre d’un seul copropriétaire;
  3. le contrat de prête-nom fait entre diverses personnes actionnaires d’une personne morale qui décident de regrouper leurs intérêts économiques au nom d’un seul d’entre eux, afin d’augmenter leur pouvoir de négociation.

 

Déclaration de renseignements

Les contrats de prête-nom devront, dorénavant, être divulgués au Ministère en remplissant et en produisant un formulaire prescrit.

Ce formulaire devra préciser :

  • la date du contrat de prête-nom;
  • l’identité des parties au contrat de prête-nom;
  • la description complète des faits relatifs à l’opération ou à la série d’opérations visée par le contrat de prête-nom;
  • le nom de toute personne ou entité à l’égard de laquelle l’opération ou la série d’opérations visée par le contrat de prête-nom se rapporte.

 

Date de production de la déclaration de renseignements

Pour les contrats de prête-nom conclus le ou après le 17 mai 2019, la date ultime de production du formulaire est au plus tard dans les 90 jours de la conclusion du contrat de prête-nom.

Les contribuables qui sont des parties à un contrat de prête-nom conclu avant le 17 mai 2019, dont les effets fiscaux continuent à compter de cette date, sont visés par cette nouvelle obligation. Ils doivent compléter et produire le formulaire prescrit au plus tard le 16 septembre 2019.

Pénalité journalière pour le défaut de produire ou de produire à temps le formulaire pour un prête-nom

Le défaut de produire le formulaire prescrit ou sa production en retard, expose les parties au contrat de prête-nom à une pénalité maximale de 5 000$, soit une pénalité de base de 1 000$ plus une pénalité journalière de 100$ par jour à compter du second jour du défaut.

 

Autre sanction

Tant et aussi longtemps que la déclaration de renseignements n’est pas produite par le biais du formulaire prescrit, le délai de prescription fiscal relatif à une année d’imposition d’une personne prenant part au contrat de prête-nom est suspendu relativement aux conséquences fiscales, pour cette année, découlant de toute opération qui est dans le cadre du contrat de prête-nom.

Bref, à titre d’exemple, si un contrat de prête-nom s’applique de 2019 à 2025 quant à la détention d’un immeuble, par des copropriétaires indivis, et qu’il n’est pas divulgué au Ministère, le délai de prescription fiscale pour les parties au contrat de prête-nom est prolongé indéfiniment pour toute opération relative au contrat de prête-nom.

 

Conseil

Si vous avez conclu un contrat de prête-nom ou pensez en conclure un, notre équipe d’avocats en droit des affaires peut vous conseiller, notamment, à l’égard de cette nouvelle obligation de divulgation.